Le colosse de l’empereur Constantin à Rome et sa reconstitution en 2023
En 2023, une équipe d’archéologues, informaticiens et d’artisans a produit une reconstitution de l’immense colosse de l’empereur Constantin, dont certaines parties avaient survécu jusqu’à nos jours à Rome. De fait, réalisé aux alentours des années 310-315, le colosse représente l’empereur Constantin lui même, après avoir réussi à réunifier l’empire. Rarement, jusqu’à nos jours, une équipe ne s’était risquée à une reconstitution de ce cet incroyable héritage de l’empereur qui avait choisi, le premier, de faire du christianisme sa religion. Un bel hommage pour un chef d’œuvre de l’Histoire des arts.
Le colosse de l’empereur Constantin à Rome
La construction du colosse en hommage à l’empereur Constantin
Constantin a marqué l’Histoire. L’Histoire romaine, bien évidemment. Mais aussi l’Histoire du monde par sa conversion au christianisme, rompant avec les anciens cultes latins. Tout commence en l’an 312 de notre ère, quand Constantin remporta une victoire décisive sur son ultime rival, l’empereur Maxence, sur le pont Milvius, aux portes de Rome. Ainsi, débarrassé, Constantin entrait dans la capitale impériale et en devenait seul empereur. Là, il découvrit un immense projet architectural inachevé : la basilica nova. Il entreprit dès lors de reprendre le chantier. C’est au cœur de cet immense édifice qu’il fit commander une statue de lui-même.
Un véritable colosse y fut réalisé : près de 12 mères de haut, en marbre et avec des drapés de bronze poli. Le bâtiment fut par la suite, avec le déclin de Rome et ses multiples pillages, abandonné. Il semble que la statue fut pillée : les parties en bronze probablement volées et fondues. Ensuite, le sort s’acharna avec deux puissants tremblements de terre en 847 et 1349. Le colosse fut enseveli sous les gravats…
ANECODTE : Le colosse a probablement connu une réparation ou une modification dans les années 325 de notre ère. Comment le savons nous ? Car l'on a retrouvé deux mains droites ! Elles sont encore conservées aujourd'hui au musée du Capitole, à Rome.
La préservation du colosse depuis l’Antiquité
C’est en 1486 que le pape lança des fouilles dans les ruines de la basilique. Les restes de la statue furent alors mis au jour, notamment le visage du colosse, préservé. Le tout finalement transféré au Palazzo dei Conservatori, à Rome, où travaillait un certain… Michel-Ange. Par la suite, le Palazzo dei Conservatori devint un élément clé du Musée du Capitole, premier musée antique au monde, ouvert publiquement sous le pape Clément XIII au XVIIIème siècle.
Le Musée du Capitole, à Rome, conserve toujours aujourd’hui les reliques restantes du colosse, dans sa cours extérieure. Elles sont toutes cataloguées (le visage est ainsi conservé sous la référence MC0757) et soignées pour une préservation dont on espère qu’elle sera encore millénaire.
Une reconstitution inédite du colosse de l’empereur Constantin
En 2006, un premier projet de numérisation et de reconstitution numérique se lance à l’initiative d’une entreprise allemande, ArcTron3D. Avec l’objectif de produire une reconstitution en taille réelle du colosse. Mais le projet restera peu accessible au grand public. Cependant, c’était une première avancée. Vous pouvez voir des résultats du travail de reconstitution numérique par ArcTron3D : ici.
Un travail numérique
Le nouveau projet voit le jour en 2022 à l’initiative du Musée du Capitole (Musei Capitolini), de la Fondazione Prada au financement et de la Fundación Factum pour la réalisation, sur une idée de Claudio Parisi Presicce. Une équipe d’archéologues, artistes, artisans, sculpteurs et ingénieurs informatiques se réunit alors dès avril 2022. Leur objectif : réaliser une reconstitution du colosse de l’empereur Constantin à l’échelle 1:1. C’est à dire en taille réelle, telle qu’elle pouvait être observée à Rome dès les années 315 !
En premier lieu, l’aventure est numérique. Le Musée met à disposition toutes les parties sculptées qu’il possède. Scannées numériquement, entrées dans une base de données en trois dimensions. Ce long travail s’accompagne d’un travail d’historien : retrouver la forme originelle du colosse. Debout ? Non. Le colosse était visiblement assis sur un trône.
Ci-dessus : plusieurs étapes de la reconstitution numérique du colosse de Constantin à Rome | Crédits : Factum Foundation for Digital Technology in Preservation (ici).
Pour définir la forme du colosse assis, les graphistes et techniciens ont pris plusieurs modèles antiques s’en approchant. Notamment l’empereur Claude siégeant sur son trône (visible au musée de l’Ara Pacis, à Rome et à voir ici). Mais aussi l’Hercule au Musée national de Rome (visible ici).
La production d’un modèle en taille réelle
Le travail suivant, tout aussi incroyable, a consisté à transformer le numérique en production physique, principalement en polystyrène. Par ailleurs, les parties normalement en bronze, comme la toge et le sceptre, ont une couleur spécifique.
Au terme de mois de travail, le colosse a fini par être entièrement monté. Ainsi, il culmine à 11,06 mètres ! Le tout en étant assis !
Pour aller plus loin
- Vincent Puech, Constantin : le premier empereur chrétien, publié en 2011 aux éditions Ellipses.
- Bertrand Lançon et Tiphaine Moreau, Constantin, un Auguste chrétien, publié en 2012 aux éditions Armand Colin.
- Filippo Coarelli, Guide archéologique de Rome, publié en 1998 aux éditions Hachette
- Catalogue de l’exposition Age of spirituality : late antique and early Christian art, third to seventh century, au Metropolitan Museum of Art, publié en 1979 chez l’éditeur Kurt Weitzmann. A consulter entièrement : ici.
- Allen Farber, “Early Christian art and architecture after Constantine,” publié en ligne, en 2015, sur le site de Smarthistory. A consulter : ici.
Quelle place dans les programmes en Histoire ?
Nous pouvons évoquer cette œuvre incroyable dans plusieurs contextes, notamment en Histoire des Arts :
- en 6ème, lors du troisième chapitre : “Des chrétiens dans l’empire” au sein du dernier thème de l’année : L’empire romain dans le monde antique. De fait, la figure de Constantin est à aborder.
- en seconde générale et technologique, dans le premier chapitre : “La Méditerranée antique : les empreintes grecques et romaines”, en introduction du premier thème d’Histoire de l’année : Le monde méditerranéen : empreintes de l’Antiquité et du Moyen Âge.
- en spécialité HGGSP, niveau première générale, pour introduire la question du cinquième thème : Analyser les relations entre États et religions.
Par Cédric LABROUSSE
Le 25 janvier 2023
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